En 1945, quand les bases du système français de retraite par répartition ont été mises en place avec la création de la Sécurité sociale, son fondateur, Pierre Laroque, souhaitait qu’il soit unique, universel et géré par les travailleurs et leurs représentants. Mais le contexte social et la farouche résistance de certaines professions ont mis en échec ce principe d’universalité. Les régimes français de retraite se sont donc créés en fonction de groupes professionnels et de secteurs d’activité. Aujourd’hui on en dénombre une quarantaine, appliquant leur propre réglementation. Certes les réformes des retraites au cours des deux dernières décennies ont cherché à harmoniser certaines règles (âge de départ, durée de cotisations, etc.) entre tous ces régimes disparates. Mais la complexité du système est telle qu’il est source d’inégalités entre les actifs de différentes catégories professionnelles et qu’il est devenu très peu compréhensible, au sein même de chaque régime, tant les textes législatifs se sont empilés et enchevêtrés depuis des années. L’actuel gouvernement souhaite donc revenir à un système universel de retraite où 1 euro cotisé donnerait les mêmes droits à chacun. Il s’oriente vers un système de retraite universel en points, en conservant le principe de la répartition : les cotisations des actifs servent à payer les pensions des retraités.
Conséquence de cette réforme systémique (on change complètement la structure du système) par rapport à une réforme paramétrique (on modifie seulement certains paramètres d’un système existant) : les régimes spécifiques – comme les régimes spéciaux – vont disparaître à terme et va se mettre en place progressivement un régime unique de retraite, qui est censé être plus équitable, plus simple et plus lisible. Ce changement, qui ne se fera que sur un laps de temps assez long suscite beaucoup de questions.
Quand s’appliquera-t-il ? Le gouvernement a prévu une période de transition. Les actifs se situant à cinq ans de leur départ en retraite ne seraient pas concernés. La réforme elle-même ne commencerait à prendre effet qu’aux alentours de 2025 et pourrait perdurer une dizaine d’années. Autres questions : comment préserver le principe de solidarité entre générations pour ceux qui n’auront pas ou peu cotisé en raison de leur état de santé, d’aléas de carrière, d’éducation des enfants, de soutien à des personnes malades ou handicapées, etc. ? Qui gouvernera ce nouveau système, l’Etat seul ou avec les partenaires sociaux ? Un système de retraite en points peut-il garantir d’une part un équilibre financier à long terme et d’autre part assurer un niveau minimum de pension ?
Le débat est ouvert. Des ateliers de concertation citoyenne, lors desquels chaque participant a pu exprimer ses doléances, se sont déroulés de juin à fin octobre 2018. Et tout citoyen a eu l’opportunité de donner son avis sur une plateforme dédiée participez.reforme-retraite.gouv.fr/. Le projet de loi doit être finalisé au cours du premier semestre 2019 et devrait être déposé au parlement avant l’été.
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